jeudi 11 avril 2013
Transit
Les murs sont blancs, le carrelage est blanc. Les escalators dessinent un paysage contemporain bien loin de nos hiers. Doha, Qatar, transit. Dans moins de douze heures (à moins de caprices des cieux), ce sera Paris, les bras de notre famille, et puis la Normandie un peu. J'aimerais dire en quelques lignes les neiges de l'Himalaya, les chapelets égrénés entre les doigts des pélerins tibétains autour de la grande stupa de Bodnath, les bouillies d'orge grillée, les nuits glaciales des montagnes, le blanc immaculé des sommets... Mes yeux, à cette heure, picotent. Autour de moi la modernité, les djellabahs, les portables, les bagages des voyageurs ou hommes d'affaires piétinant entre deux vols. Retour vers une autre civilisation. Je prendrai le temps ces jours à venir, je l'espère de narrer ces six semaines népalaises signant la fin de l'odyssée. En attendant puissiez vous lire les images et voyager quelque peu encore à nos côtés.
mercredi 10 avril 2013
Au pays des montagnes enneigées, en chemin pour Chialsa
Sommets de l’Himalaya recouverts d’une poudre blanche
dissimulés derrière les nuages.
Femmes rentrent des altitudes transportant des paniers
remplis de bois à l’aide d’une bandoulière appuyée sur leurs têtes.
Muret de prières tibétaines construit au milieu du chemin à
contourner dans le sens des aiguilles d’une montre pour porter chance. Drapeaux
de couleurs flottent au vent. En haut, le bleu signifie le ciel, ensuite le
blanc les nuages. Rouge, le feu, vert l’eau et jaune la terre.
Soupe à l’ail pour se réchauffer le soir à 2700m de
dénivelé.
Quatre jours de marche pour atteindre notre but, Chialsa.
Chemin descend un col pour après, en remonter un autre.
Maisons de campagne en pierre et bois dispersées dans la
nature.
Chèvres gambadent d’une touffe verte vers la suivante pour
le déjeuner.
Rhododendrons en fleurs bordent le chemin
Buffle accroché derrière une habitation pousse un cri très
aigu.
Blé cultivé dans des terrasses prenant place sur les monts.
Torrent dégringole dans la vallée.
Tuyaux amènent l’eau pure des montagnes qui coule en
abondance.
Anna
Anna
mardi 9 avril 2013
Katmandou : ce nom qui évoque tant de choses
Immense nuage de pollution, gaz et encens s'emmêlent, même si ces dernières volutes de suffisent à couvrir l'abominable senteur des pots d'échappement. Véhicules tenant encore assemblés par la seule voie du Saitn-Esprit, rien n'empêche pourtant ces carcasses branlantes de brinquebaler hommes et femmes d'un bout à l'autre de la capitale. Accrochés à nos montures, traversons cet imbroglio, ces rues tantôt cailloux, tant asphalte fendillé, le nez, les yeux rivés sur la marée grouillante. Bénis par les mouvements de contestation nationale, nous aurons tout de même le privilège de naviguer deux jours durant dans une cité déserte. A nous les artères vides, de Patan à Pashupatinath, les places aux jolis temples exemptes de tout chaos. Amusant de vivre ces contrastes : de l'agitation et des embouteillages époustouflants au vide absolu. Les maoïstes impressionnent suffisamment le petit commerçant pour le dissuader d'ouvrir son rideau métallique et de mercantiliser en ces jours de sacro-sainte grève. Créneau paisible dans lequel notre troupe à pédales n'est pas la seule à s'engouffrer. Footballeurs ou cricketteurs en herbe conquièrent le territoire, s'emparant joyeusement de l'inhabituelle vacuité de l'espace pour jouer.
Katmandou, un nom, une consonnance particulière, une réalité bien moins exotique.Une ville que l'on savoure ou déteste, architecture anarchique, seventies à l'emporte-pièces recelant néanmoins dans ses arrière cours nombreuses fenêtres ouvragées, sublimes joyaux de de sculptures sur bois. Stupas et temples se nichent aussi dans le moindre recoin. De ci, une poule éventrée offerte devant un autel, de là, des divinités de thikas maquillées. Univers épuisant, attachant. Et pourtant curieusement, il m'arrive encore de penser "mais où est donc toute cette folle énergie indienne ?". S'habituerait-on si vite à la surenchère sonore des klaxons, beuglements, criées ?
mercredi 6 mars 2013
Joli voyage à toi, papy
Huit mille et quelques kilomètres
ont défilé sous nos gambettes. Tours de roues et grimpettes, courbes et
asphaltes brulants, graviers et poussières, pistes rouges ou macadams pimpants,
huit mille et quelques kilomètres de notre fief aux faubourgs de Katmandou.
De Bandipur à Dhunré, au petit
matin, il y a trois jours, avons savouré intensément notre belle dernière
grande descente, au pays des contreforts de l’Annapurna.
Au petit matin, il y a trois jours
aussi, de l’autre côté de la terre, Papy s’en est allé. Ses pédales depuis
quelques temps déjà, il avait abandonné.
Le chemin, un brin plus loin, à sa place, avons continué.
S’il n’y avait eu ces tours de
cantons, ces dimanches cyclo-grignanais, serions-nous aujourd’hui à l’issue de
cette si belle aventure ?
Emus, nous retrouvons cette photo,
qu’au nom de toute notre petite équipée, nous ne pouvons nous empêcher de
poster.
Henri : première coupe à Grignan |
Merci papy pour cet élan
insoupçonné,
Que ton voyage soit aussi beau que
celui qui nous a été donné de vivre ensemble tout au long de cette année.
Henri, Isabelle, Jacob, Anna,
Claire et Bartimée
mardi 5 mars 2013
samedi 2 mars 2013
Crémations en plein air
Groupe d’hommes se faufile dans les rues piétonnes
Des mantras ils fredonnent
Brancard sur les épaules
Dessus, un corp inanimé.
Au bord du Gange
Homme sans vie remue
Au rythme des vaguelettes.
Un autre attend les flammes
Dissimulé sous des bûches de bois.
Fumée monte vers le ciel
Le long des joues rouges.
Tête va bientôt exploser.
Fils au crâne rasé
Va bientôt pouvoir s’en aller,
S'animera un autre bûcher
Viendra le tour d’un nouveau mort…
Anna
dimanche 24 février 2013
Varanasi : La vie, La mort
La vie, la mort, Hommes, vaches, singes, chèvres. Escaliers,
escaliers, la bouse dégouline, l’urine embaume. La vie, la mort, brute, rustre,
insolente. Varanasi.
Ghats bondés, sâdhus
s’exhibent, manteau de talc, bijoux au grand air. Renoncement. Primitivité. La vie, la mort, le rien, le
trop. Excès de nud ité, d’excréments au coin des flaques. La vie, la mort.
La ville s’enrhume, il pleut, la ville enfume. Visages de
mort immergés, sourires sereins jaillissant de des linceuls de fleurs ou bien
figés. Tikas sur la face. Grimages hindous. Eléments, fusion, l’eau, le feu, la
vie, la mort, rien d’autre.
Balance à bois, ça discute dru le prix du stère. Combien de buches
pour taire les chairs ?
Bûchers crépitent de nuit, de jour, corps amassés attendent
brasier ; le fils rasé allume flammèche ; brindilles, rondins, tisons
rougeoient.
Femmes au lointain, derrière veille at home ont assisté.
N’iront jamais funérailles rallier. Une
affaire d’hommes ; dans les ruelles tortueuses, mantras soudains poussent
le passage. Marche couratée des porteurs de civières de bambou ; Dernière
errance labyrinthique et bien secouée pour le dit mort sur palanquin chaviré. Les chants, les fleurs, ni
fanfreluches, ni pincettes. Ni pleureuses, ni satin moiré. La vie, la mort, égouts
et rats, déchets et couronnes, feu palais de maharajahs et cahutes d’éclopés.
La vie dans la mort, la mort dans la vie, misère et
splendeur d’un monde cahoté.
Puja du soir. Mains jointes et ferveur, danses et valse de candélabres,
pétales de fleurs s’échappent des paumes des brahmanes.
La vie, la mort les
pieds devant. Mes yeux se perdent dans le vide. Odeur de chair rôtie. Ni chaud,
ni froid. Mes yeux se perdent, rien n’est plus simple.
Les enveloppes se
consument, l’âme s’échappe vers un ailleurs. Plus de carcasse, plus de prison.
Corps offerts à l’eau, offerts au feu. Poussières dans la poussière.
Assise sur les marches, j’admire ce dénuement, l’absence de chichis,
la brutalité peut-être de l’épluchage des âmes.
La Gange, pur fleuve nauséabond, saturé d’ordures ert
d’excréments. Une femme se soulage accroupie à quelques pas de moi, les fesses
à peine dissimulées aux passants ; Une vache passe. Une chèvre bêle.
Quelques pèlerins portent à leur bouche une gorgée d’eau sacrée. Dans la rue
derrière, s’étalent sur le sol épices et légumes ; dans la rigole pisse un
homme, lignée jaunâtre croisant le silon d’un rat en perdition.
La vie, la mort, le pur, l’impur. Intense chaque seconde,
chaque regard posé. Intense le mouvement de la foule cherchant la rive,
charriant l’offrande, attendant le bain. Les barques entassent saris et
turbans. Intense la nausée, mélange de jasmin et d’urée.
La fourmilière de la mort crépite d’heure en heure.
Cervelles défuntes ou pèlerines cherchent les eaux ; mendiants et
charmeurs de serpents, racoleurs ou apprentis dénudés se partagent les rives
d’une cour de miracles assoiffée.
La vie, la mort, abrupte poésie.
Gokarna ou l’autre monde en mal d’hippie-cité
Kudle beach
Il est une heure, deux heures peut-être puis quatre, cinq,
qu importe, le décor n’a pas bougé ; Assise à une table sous une
paillotte, j’ausculte la rumeur du monde: Gokarna, fief de hippies en mal d’une
époque révolue. Le sable est blanc, ses habitants le sont aussi ; Sur les
doigts de ma main, je pourrai dénombrer les visages indigènes.
Ennui. Que faire ici , Les flots sont paisibles, les
montagnes autour jolies, l’eau à température idéale. Marseille ou
Port-en-Bessin serait peut-être du pareil au même. Un vieux routard enturbanné,
la ride abondante, l’oisiveté clinquante cherche oratoire, capture l’oreille
d’un jeunot au torse nu ; Et nous voilà partis pour une déblatération de
comptoir ; Mon tympan écume les nouvelles de blancs s’apitoyant sur la
conjoncture métropolitaine, la flambée de l’immobilier, le montant insensé des
taxes sur le vieux continent, l’impossibilité de se dégotter un emploi,
converse la bouche suçotant au goulot,, les orteils dans le sable, les yeux
rivés sur les flots ; 68 et ses
regrets ; Suis-je amusée ou agacée, me réveillant d’une sieste, une poule
sur ma tête ?
L’ex soixanthuitard narre ses virons anciens dans l’Inde
rurale à motocyclette, remuant du souvenir et de « l’authenticité ».
Les fraises ne sont pas encore sucrées. Une poule fait des allers retours sur
la margelle de ciment au-dessus de ma tête.
Une grand-mère baille aux corneilles, tapotant le popotin de
sa petite-fille toute juste émergée de lq sieste. Les vaches curieuses lorgnant
vers les tables se font refouler d’un cri de psiit vers le sable ;
L’homme au turban dégouline sous son turban : la
conjoncture est tellement difficile. Il est temps d’aller se mettre à l’eau.
Quoi faire de mieux sous ces auspices si peu sarisés, épicés, que faire sous
ces babas auspices colons. ?
Ca gratte de la guitare, enfile des perles à vendre ou l’art
de piquer pitance aux locaux sur la plage. Un moteur de bateau me tire de ma
contemplation septique. Le soleil descend sur l’horizon ; Je fixe les
cornes d’une rousse ovine plantée face à ma moue. Un corbeau se pose sur son
dos.
Que fais-je encore à élucubrer sur l’univers qui ici
m’échappe. Le Gokarna des flots sans doute bien étranger à celui qui s’agite de
pèlerins aux 4 temples de la bourgade. Un monde, des mondes. Du bikini au long
sari. Je perds mon latin, je perds mon indien.
Je voudrais retrouver les chemins même déserts, même
hostiles de cet intérieur des terres, croisée le quotidien d’un peuple.
Cher karnataka
Charrues, vaches à clochettes
La paille étouffe, croule sur les charrettes.
Est-il plus d’hommes ou de bœufs en ces terres
reculées ?
Assemblage de pierres en guise de maisons
Récolte manuelle du coton.
Tentes de cueilleurs, bâches de fortune,
Sourires de mômes et de travailleurs
Bien en peine le policier de foule faire circuler lorsqu’une
fine équipe à bicyclette parait !
Indiens curieux, toucher manettes, tripoter sonnettes.
Horizon désertique, chaleur extrême
Belles vaches aux cornes teintées.
D’un campement, une image me reste.
Une jeune femme avec douceur, accroupie sur la terre
toilette un vieux grand-père ;
Devant quelques rangées de palmiers, champs de tournesols se
dressent.
Visages burinés, ouvriers de la glaise faonnent briques
d’argile
S’empilent, s’empilent.
Quelques pères rafistolent d’un bout de ficelle leur moignon
de cahutes
Les femmes balaient leur carré de seuil en terre battue.
Devant la coopérative, les camions de coton attendent en
file
Autour du puits, petits et grands pour la corvée d’eau
matinale s’agglutinent.
Les tracteurs croisés m’amusent de leur musique bien gaie et
de leurs quelques guirlandes toujours décorés.
Traversons en quatre jours 350 kms d’une contrée à
l’agriculture ancestrale. Herses par bœufs tirée, céréales à pied pilées, joli
parcours au cœur de l’indienne ruralité Durga temple : Hampi
Hampi : temple de Durga
Un vieil homme à la longue barbe blanche médite au fond de
sa grotte chaulée. Devant le temple, des singes se bagarrent une noix de coco,
alternant cache-cache et provocation. Un frangipanier orphelin de ses fleurs
s’est paré de sacs de couleurs suspendus en masse à ses branches. Sur la façade
peinte, Shiva et son lion terrassent le Dieu du mal.
Un vieillard rachitique aux longs cheveux jaunis se tient fébrilement
accroupi les mains jointes à quelques
pas de la cérémonie ; Trop impur sans doute pour effleurer le sol de ses
pieds nus et cornés. Ses ongles sont sans fin, sa besace sans fil, jusqu à moelle élimée. Son bâton de pèlerin sommeille
à ses côtés.
Jacob dessine discrètement assis sur un petit muret en
retrait.
Les collines de pierre ocre empilées saupoudrent la verdure
alentour. L’encens emplit mes narines, les poojas nourrissent mes tympans.
L’Inde est un spectacle sans fin.
Le singe a finalement chapardé ce qu’il reluquait.
Menue bribe de Kerala....suite un jour...
Tarmac : une nuit de janvier.
Tapis roulants,
cartons.
Nos vélos dans leurs
emballages, nous debout dans un grand hall.
Derrière nous, les diabolisations d’un sous-continent à
enterrer, a priori et peurs à dépasser.
Un tampon sur nos passeports. L’inde est là, un aéroport,
une route, des taxis, rien de bien différent de ce que nous avons pu connaitre
ailleurs. Regardons les visages, observons, écoutons. La nuit.
Au pays du tout possible, frayons notre chemin nocturne dans
2 grands taxis, bourrant vélos et bagages jusqu’ à la ville.
Kerala : Kochi.
Chaleur douce, nous nous évanouissons dans les bras de
Morphée. Trop tôt encore pour annoncer la couleur. Demain, nos yeux capteront,
diront, raconteront peut-être.
« Dur, dense, contrasté, chaos, chauffard, arrogance »,
une litanie de mots associée à cette terre traverse fugacement mes premiers
instants de veille.
Qu’est-il de l’autre côté de la porte ? Allons-nous
être cernés, assaillis ?
Paquetons pressés par l’impatience d’un tenancier peu
aimable, comme il en est à chaque bout de terre. Petite balade de filles en
éclaireuses, cherchons gite à notre convenance.
Le lieu est calme, reposant. Atmosphère de village, sourires
des passants. Où sont donc les cris, les intrépides klaxons, les
rabatteurs ?
L’électrochoc n’aura pas lieu.
Kerala, ou l’Inde aseptisée sans doute. Le long de la plage,
serpentin d’élèves en uniformes, promenade scolaire à la lisière des flots. De
jeunes garçons attendent qu’un instantané fige leur humeur de joyeux drilles.
Les jeunes filles en retrait, espèrent-elles la même chose ?
Sur la rive en amont, se dressent les filets chinois, hissés
par des potences.
Immenses nasses aux allures de papillon. Pêche infime, les fishermen
oisifs haranguent de loin les blanches
figures, l’espoir de quelques deniers glanés,
par une démonstration, une photo.
Les anciens, assis en retrait de l’avant-scène discutent,
parlote de square avant que la boule rouge ne s’éteigne à l’horizon.
Une, deux barques peut-être remontent quelques poiscailles,
un cousin de narval à longue pointe, et une brassée de petits remuants. Attroupement immédiat, échanges de chiffres,
enchères, la marchandise échouera sur le stand du plus offrant.
Bourgade paisible, loin de nous le grouillement prédit, la
bousculade et le harcèlement.
Nous voici pilotés,
nantis de pointillés dessinés sur une carte, de maisonnées pour nous abriter à
chaque étape, de numéros de téléphone d’amis d’amis d’amis en cas de nécessité.
Enchainons les douces rencontres qui de fil en aiguille
tisseront tout au long de notre route kéralaise un fabuleux itinéraire cousu
d’un incroyable fil d’hospitalité. Accueils familiaux des plus chaleureux,
partage de thé ou de repas, la magie des anges opère une fois de plus.
Quel visage aurait revêtu l’aventure indienne sans George,
Dax, Dilip, Suchitra, Shaji, joshee, Sudeer, Retheesh, Pushpa et compères, si
soucieux de notre bien-être ?
En guise de paquetage dominical, la clémence d’un jour de
trêve. Laissons dans notre dos la synagogue, et filons plein sud.
Maisons quelconques
mais couleurs safran, turquoise, fuchsia, anis ôtent à la banalité
architecturale toute désolation. Quelque
chose de scintillant, de riant. Les saris des femmes, les longji des hommes
noués, remontés souvent, multi-usages ; torsadé l’ourlet en flammèche propice à se curer le nez. Les
petites filles sur leur 31, un missel à la main dans leurs volants de
princesses à pampilles.
Temples, bibles
empaquetées, clameur de la mosquée, musique du temple hindou, dimanche en bord
de route.
Concurrence confessionnelle, présence forte d’une chrétienté
bigarrée, de l’église de la petite fleur, à celle de tous les saints, les
dénominations multiples et exotiques vont bon train. Cultes fréquentés. Clameur
des chants et prière dans l’air.
Une trentaine de kils avant de filer sur les eaux
mercredi 20 février 2013
Goa
Cinq semaines bientot que nous sillonnons le territoire indien. Le Kerala tout comme le Karnataka nous ont ravis et nous voici maintenant dans la province de Goa pour un bref transit et un dernier bain. Ce soir, un train de 36 heures nous transportera vers le nord, sur les bords du Gange. Immersion de quelques jours dans cette ville de Varanasi ( Benares) avant de continuer notre periple vers le Nepal. Nos bicyclettes suivent toujours. Chaleur, cols et atmosphere parfois desertique nous ont mis quelque peu a l'epreuve. Mais l'Inde nous seduit. Nous tenterons d'utiliser nos longues heures ferroviaires pour mettre de l'ordre dans nos derniers recits un peu brouillons.
lundi 4 février 2013
Clin d'oeil des cousins
Si les bébés savaient de quoi ils descendent, ils feraient bien vite demi-tour
Dans les backwaters
Fils électriques traversant la rivière
Attendant les bateaux
Son sac sur le dos
Se dresse une écolière.
Bananier écroulé
Palmier étêté
Homme seul à naviguer
Du moins essayant d’avancer
Oiseau blanc perché
Sur un piquet planté
Qui se fait arroser
Par les vagues de Janvier
Nénuphars à gogo
Fleurs et herbes d’eau
Ralentissent les bateaux
Homme nous regardant passer
Maisons cachées derrière les bananiers
Homme perdu sur un rocher
Par les flots, entouré
Une femme l’observait
Tout en portant son bébé.
Toutes ces petites saynètes
Je les ai vues
Assise sur une banquète
Lors d’une promenade en bateau
Avec Allepey pour départ et arrivée
Claire
A la découverte d'un monde aquatique
Il est tôt le matin,
Je me lève,
Rejoins le port d’Allepey
Et enjambe le ponton
D’un bus public flottant.
Prenons place
Le moteur démarre
Elèves révisent,
Tandis que j’observe les alentours.
Un homme remonte sa jupe,
Descend de son embarcation
L’attache à un piquet
Et essaye d’attirer les regards de touristes.
Un monsieur rame
Pour faire avancer le bateau
Faisant tinter le ding de sa sonnette
Puis force plus pour continuer
Malgré les plantes d’eau le freinant.
Notre transport s’immobilise
Pour accueillir des écoliers à son bord
Demoiselle court
Pour ne pas rester sur l’embarcadère.
Le contrôleur relâche la corde
Et le bateau décolle
Laissant derrière lui
Des passagers descendus.
Rejoignons les autres navires
Remplis de visiteurs
Encore endormis dans des barges
Qui rêvent de la nuit passée
Au milieu de l’eau
Sous un abri de paille.
De la petite cabine
Perchée sur le toit
Le capitaine tourne le gouvernaille
Afin de se diriger parmi ce labyrinthe de canaux.
Aïe ! Moteur ne veut pas démarrer
A bord d’une petite barque
Se balançant sur l’eau
Au rythme des vagues
Moi, j’ai un rêve
Le même que celui du chat
Assoupie sur les flots :
M’en aller voyager
Et ne jamais m’arrêter !
Anna Pascal—Jenny
Le 22/01/2013
ALLEPEY
Sur la rive, nous apercevons un grand bâtiment, sûrement un hôtel, imposant sa silhouette parmi les palmiers. Des sacs de couleurs différentes entassés les uns sur les autres. Des panneaux publicitaire perdus au milieu de la végétation, dont un sur lequel est affiché une image de Jésus derrière des écritures en Malayam. Un bateau couvert, à l’aspect d’une gondole, décoré de fleur. Un temple, se préparent à la fanfare. Certains palmiers « pleureurs ». Un serpent d’eau. Des volatiles debout sur des touffes d’herbes flottantes. Du Linge étendu à sécher. Un tractopelle garé au bord de l’eau. Des maisons de style arabe, souvent fuchsia. Des barques le long de la berge. Un enclos, ou plutôt des « estrades », de canards. Des poteaux tordus, en forme d’arbre ; voir renversé et recouvert de végétation. Des marécages, que traversent les pylônes. Des nénuphars… Les bateaux de nuit défilent (on se croirait aux Champs-Elysées). Deux hommes discutent sur un banc au bord de l’eau, tournant le dos aux Backwaters. Un autre, à l’ombre dans son tracteur, papote. Un chauffeur de tuk-tuk patiente dans son véhicule. Un vieux monsieur fait la bronzette dans son champ tandis qu’un autre est confortablement assis à l’arrêt de – non pas de bus mais de – bateau, fumant. D’autres silhouettes rament, debout dans leurs barques. De leur côté, deux indiennes discutent, l’une assise dans sa barque pendant que d’autres font leur lessive dans le cours d’eau. Une femme coure vers le bateau, s’essuyant le nez avec son sari. Une autre se promène avec son parapluie… Les mouettes font des passages furtifs, rasant la surface de l’eau. Les oies se dandinent dans les rizières irriguées. – Envolée d’oiseaux soudaine qui finalement fais demi-tour et ne cesse de changer de forme. – Un héron crâne, rentrant le cou par moment, sur un pieu traversé par le courant. Un chat se repose – quoique anxieux à cause du balancement – sur une barque à moteur… Un petit bateau couvert, St Joseph, s’avance sur l’eau. Une écolière attend le bateau, son chien à côté. Un « troupeau » d’indien arrive pour monter à bord. Des écoliers en uniforme – avec leur carte d’identité pendant et leur « tache rouge » sur le front – s’agitent dans le « vaporetto ». […] Terminus : la faune flottante recouvrant toute la surface de l’eau : il devient impossible d’avancer. Jacob
Gratter le ciel
Immeubles élevés
Le ciel se fait gratter
Beaucoup de stations de métros
et de centres commerciaux
Bateaux circulent sur le dos de la rivière
La musique d’un petit concert de jazz
se faufile entre les projections de lumière
Eglises catholiques
Grandissent dans ces quartiers riches
Plus reculés loin du luxe
Indiens et chinois vont prier
Chacun dans leurs quartiers
Chacun leurs divinités
Parlons maintenant du safari de nuit
Girafes et éléphants
Tigres et léopards
En voilà bien qui n’ont pas peur du noir
Claire Pascal-Jenny
Transit malais
Une heure cinquante de vol nous projette ailleurs. Si
étrange de quitter un pays si
rapidement, habitués que nous sommes à franchir les frontières à dos de mulet
mécanique.
Kuala Lumpur international : l’aéroport est à 72 kms au
sud de la ville. Nous n’irons pas mesurer nos frêles silhouettes à la hauteur
des Petronas towers. Cap au sud ! Contournons circuit de formule un,
roulons sur des bas-côtés semblables à des bandes d’arrêt d’urgence
d’autoroute. Grands axes, circulation intense. Peu de plaisir à la roulerie.
Collines s’enchainent pour rejoindre le bord de mer ; à perte de vue se
dressent les arbres à palmes et leurs stations d’exploitation.
Le climat est troublant, un ciel laiteux, nuageux qui nous
vaudra une belle rincée. Chaleur
modeste, autour de 28°, mais chargée de 80% d’humidité. L’équateur n’est
pas si loin. Enchainons les courbes puis les premières traversées de bourg
quelconques voire sordides. Successions d’immeubles mal crépis à deux niveaux,
arcades pâlichonnes où se succèdent pêle-mêle échoppes de pneus, d’ordinateurs,
d’épicerie, de massages. .. et j’en
passe.
Port Dickson, dépassons le centre pour coller au front de
mer, une Grande-Motte piteuse et décatie, enfilade de barres cages à lapin,
logement de fortune des locaux en week-end ponctué de resorts un poil plus
fringants. Echouons dans un dortoir sordido-cour de pension. Mais dame est indienne
accueillante et lits seyant à notre porte-monnaie !
Express plongeon dans les eaux de la baie avant quête de
repas dans une petite stalle à
nourriture.
Réajustons à matine nos pédales poursuivant sans « extase »
une route relativement fréquentée. Arrêt en vue au cap Rachado pour une petite
balade pédestre sur falaises jungleuses au-dessus de la mer. Demandons
hospitalité pour vos vélos dans un resort. Bleu piscine bien tentant.
Succombons à la tentation en c t sommes comblés d’un appartement face au bleu
bassin pour le plaisir des petits et grands. Journée détente. Fin sortis des
eaux, convainquons la troupe de grimper au phare au milieu de la jungle. Balade
sympathique et rencontres avec deux singes à la bouille relavant plus d’une
frimousse donald duck ou caliméro . Etonnant !
Territoire de migration, quelques rapaces planent dans les
airs. Descendons sur une petite plage. Joli havre de tranquillité. Ne
manquerait que le lagon bleu. Mais loin le mirage. Commerce pétrolier et zone
industrialisée rendent la mer côte ouest peu attractive !
Courage, encore une longue bardée kilométrique avant de
rallier « la ville Unesco » : fief protégé, maisons blanchies à
la chaux ou bardées de grandes fresques,
un canal, deux rives, Mellaca rebiche sous ses proprettes façades chinoises à
la Suzhou. Un quartier rose à la portugaise, un bout de rue indianisant. Imbroglio
d’immeubles fadasses et d’anciennes maisons malaises traditionnelles de bois
attifées d’une volée de marches carrelées. Mélange peu reluisant à mes yeux d’européenne.
Bois ancien patiné et frétillants carreaux à la Leroy-Merlin font bien curieux
ménage !
Le kitsch n’est pas loin. Trickshaw discos et paillettes, à
qui sera le plus tapageur. Barbies et fleurs artificielles, cœurs clignotants et
roses oursons parent ces trois roues éléctriques. Quils ont l’air ratichos nos
vélos si simplets !
Malaisie métisse aux hôtes si souriants, si prévenants. Peu
enthousiasmés par les routes, nous sommes charmés par l’incroyable sympathie
des habitants. Indiens, musulmans et chinois, trois univers en un. Un
cosmopolitisme à notre guise, de belles rencontres et un accueil cyclo bien
encourageant.
dimanche 3 février 2013
Temples d'Angkor
Toiles d’araignées coincées entre les pierres qui
s’entassent dans les cours des temples.
Racines des arbres envahisseurs prises en photo comme des
stars.
Danseuses Apsara dispersées sur les murs.
Tuk-tuk, bus, voitures circulent sur les grandes avenues.
Nous, cyclistes, nous faufilons sur les petits
chemins enfouis dans la jungle d’Angkor.
Arbres ont des noms et cartes d’identité à leurs pieds...
Montgolfières et hélicoptères grimpent et survolent les
temples.
Éléphants marchent au bord des routes, de temple en temple, montés par des touristes
Soleil se couche entre les tours d’Angkor Wat admiré par
tous les visiteurs.
Anna Pascal-JennyDe Battambang à Siem Reap
Le jour se lève sur Battambang, les sacoches allégées de tout le matériel de camping (merci Pierre et Martine) s’accrochent à nos montures. Sortie de ville, lumière douce, apparition : un petit marchand de riz propose aux passants de bigarrés cerfs-volants. 7h ! Drôle de négoce matinal !
Les moulins à riz émaillent la route. Tri, ensachage. La
nationale 5 est cryptée de menus marchés. Les vêtements flottent sur les
cintres au hasard des routes. Perdu au milieu de rien, deux tréteaux de bois et
un amas de chainse-hifi. Trouver de tout partout ou trouver surtout ce à quoi l’on
s’attend le moins.
Une succession d’attelages insolites nous font sourire. Des
scooters nous doublent, garnis de dizaines de canards cancanant dans leur
panière d’osier. Quelques cochons aussi à la renverse ficelés à l’arrière des
deux roues grognent sur le chemin de leur migration : « transhumance
ou abattoir ?
Pendouillent derrière les mobylettes aussi kyrielle de
saucisses au vent (cochons : deuxième étape : qui sait ?). Un
gai luron nous double, embardée fantaisiste d’un conducteur chaloupant sous une
impressionnante quantité de matelas.
Les pyramides roulantes de l’Asie n’auront jamais fini de
nous surprendre ! Cinq sur une mini-cylindrée ou charges incommodant la
vue semblent ne déranger quiconque.
Les rizières s’étendent à perte de vue, se partageant entre
verdure et blondeur, sèches cependant pour la majorité. Mares et fossés boueux
rassemblent nombre d’individus enfoncés à mi-corps dans les eaux brunes à la
recherche de quelques « écailleux », le casque parfois encore
cocassement arrimé à leur tête. Le pied des eaux un peu plus claires est
prétexte à suspendre hamacs ou se
détendre sous une paillotte.
Sous les toits de palme tressés, s’alignent quelques bols et
aliments, picorage collectif : habitude quotidienne ou exception
dominicale ?
8h, Le trafic s’intensifie curieusement. Sur les plateaux
tractés derrière les motoculteurs, s’entassent petits en uniforme ou ouvriers
perchés sur la jute des ballots.
Presque 100 kms encore, dépasser Sisophon, avancer, dormir.
Dans un village de sculpteurs de pierres où les bouddhas étincellent sous la
lumière du soir, posons nos sacs de couchage sur le carrelage d’un temple
ouvert aux 4 vents. Quatre du matin au pied de l’autel, commencent les mantras !
Youpi la jolie nuit !
Un long tronçon nous attend encore en ce 31 décembre. Et les
enfants de dire : c’est bizarre, on dirait la Belgique chaude. Furtif retour
quelques mois en arrière. Relief zéro, canaux. C’est vrai qu’il est un petit
air de plat pays. Aurions-nous perdu notre « Est » ? Trouverons-nous
Brugges ou Angkor à la tombée de la nuit.
Les équipes de travailleurs agricoles sont disséminés le
long des champs, apparaissent même quelques vraies machines, moissonneuses
batteuses, tracteurs. Qu’il est long ce trajet, qu’il est long. 186 kilomètres
avalés en deux jours sous les cieux de fin d’année. Il semblerait que ce soir,
n’aurons point le mollet prompt à guincher. Echouage dans une ville
méconnaissable. 600 000 lits dans un de ces confins du monde devenu pure plate-forme
touristique. Ne reconnaissons rien ! Vertigineuse mutation !
Demain sera une autre année et tout le temps pour cet
univers appréhender.
De Phnom Penh à Battambang
Après une aventure fausse-route nous ramenant à la case départ et à une errance inattendue, tentons de cheminer vers l’ile de la Soie. Chaque ile du Cambodge sera pour nous une bouffée d’oxygène, une occasion de goûter à la vie simple, ponctuée de menues tâches quotidiennes.
Vieilles femmes à plat ventre dans l’embrasure de leur porte
à demi-assoupies, buffles ou cousins zébus garés devant les maisons en attente
de labeur, charrues à belles roues de bois somnolant sous les bananiers. Métiers
à tisser adossés à presque chaque logis. Chaises de coiffeurs égarés dans la
broussaille. Abris de paille et de repos en bord de plage. Qu il est succulent
de respirer loin du tintamarre !
Le silence nous requinque après ces fragments de nationale
quelconque, à l’asphalte si réverbérant. La période de Noël nous offre
cependant un présent fort apprécié. Passons sous la barrière des 30°. Un petit
vent même en supplément.
Retard sur notre programme. Plus le temps de quitter à
pédales les rues numérotées de la capitale, les psar grouillants. Bus encore,
tant pis pour Udong, Kompong Chnang, Kompong
Luong, il est des portions auxquelles il
faut savoir renoncer : et lorsque l’on a fin négocié l’embarquement de
cycles dans une soute, point question de descendre à mi-parcours !
BATTAMBANG :
Ravis d’échapper au bruit, de renouer avec une douceur
provinciale, goutons quelques journées paisibles et bucoliques à emprunter les
chemins alentours. Les galettes de riz sèchent sur les grilles, allures d’hosties
dimension ++. Les bananes dorent sur des brochettes au soleil, futurs snacks
bien croquants en bouche. De jolies maisons de bois au fil des villages. Des
sentiers de terre bordant la verte rivière croupissant sous un lit de lentilles
d’eau ; Joie toute simple du
moulinage sans but précis, le nez au vent.
Anna, 12 ans, journée passée à l »école de cirque «
Phare Ponleu Selpak ». Break culturel .Ca faisait un bail que l’on ne
s’était pas mis un spectacle sous la dent ! Mais c’est qu’ça fait
sacrément du bien !
http://www.youtube.com/watch?v=nKD_tkYLBhk&feature=player_embeddedmercredi 16 janvier 2013
Entre ville et mer. De Phnom Penh à Kampot et Kep
Phnom Penh, marée humaine, scooters louvoient au milieu des
files denses de 4 roues. Quelques cyclo-pousses haut-perchées subsistent péniblement, héritage en voie d’extinction. Les
pick-up n’ont guère renoncé en 16 ans aux surcharges terrifiques. Sourions à la
vue de l’un d’eux submergé de quelques centaines de vélos
Les câbles électriques assaillent toujours les poteaux d’une
manière aussi anarchique. Immeubles
seventies griseux inchangés, un peu plus fanés peut-être. Nous retrouvons notre
bon vieil hôtel Capitol, égal à lui-même. Le bruit des boulevards aspire nos
tympans. Tokoloks et œufs noirâtres, stands de riz frits, rien de bien original.
Une pitance dans la lignée des pays précédents.
Des chantiers émaillent nombreuses artères, zones
primitivement rurales en reconversion promoteur. Naissent ainsi des ilots de
complexes luxueux parachutés au milieu d’un décor peu transcendant. Je cherche
en vain l’harmonie de la ville. Phnom Penh n’a pas le pouvoir de me séduire. Le
niveau sonore m’agresse. Bords de fleuve trop trafiqués aussi. Je cherche en
vain les lieux de retraite.
Déposons rapidement nos demandes de visas auprès de l’ambassade
indienne. Pas l’âme à poireauter en capitale une semaine durant. Option
escampette maritime. Parquons bicyclettes et filons pour quelques 5 heures de
bus vers la mer.
Trois jours de flânerie douce entre baignade et balade au
pays de la pêche au crabe.
A deux pas des vagues, s’étalent des centaines de hamacs en
location. Amusante vision !
Kampot à quelques vingt-cinq kilomètres nous réjouît tout
autant. Fief du poivre, de quelques marais salants, ne pouvons retenir l’envie
de louer des vélos. Décidément, les PJ semblent arrimés à chaines et pignons.
Bucolique promenade dans un décor tranquille partagé entre ruralité et bourgade
aux vieux airs coloniaux. Grain de charme suranné.
Une échappée promesse mène la troupe à Koh Tonsay, l’ile aux
lapins : un après-midi et une soirée de lézardage et barbotage. Du hamac
aux flots verts, d’un temps lecture au quart d’heure massage pour les enfants.
Des cocotiers et de l’eau, quelques barques rouges et vertes, ils n’en
demandent guère plus et sembleraient bien vite s’adapter à une forme d’exotique
farniente.
Parenthèse engloutie, sonne l’heure de retrouver le monstre
de brouhaha et l’étouffement de la ville. La chaleur rabat vite toute velléité
de visite. Cherchons et trouvons le frais au centre culturel français. Ne
cherchons guère mais trouvons rencontre extraordinaire. Lorsqu’enfants jouent
ensemble, parents finissent par se causer. Henri de lever la tête : nez à
nez avec un ex collègue. Noël prend des airs de fête et de cocon. A Phnom Penh
resterons et le 24, point seuls ne passerons. Un Chouette cadeau pour petits et
grands !
Nous profiterons de ces jours aussi pour partager du temps
avec des connaissances d’amis, des moments pour comprendre un peu mieux du
dedans aussi ce qui se vit ici.
Mon estomac ramasse joliment, menus examens sans suite, un
métabolisme normal revient petit à petit. La touffeur du climat nous traine
tous un peu au ralenti.
Activité menue, menue. Sur la place du palais royal, trône l’icône
du feu « King ». Se relaie devant son portrait entouré de boutons de
fleurs noirs et blancs, un cortège de citoyens paré de ces mêmes couleurs de
deuil, venus rendre hommage à leur roi défunt. Les femmes élégantes, sarong
sombre, chemise blanche brodée, étole noire sur l’épaule s’avancent dignement
vers le corps de l’emblème disparu. Des sortes d’anémones blanches s’accumulent
sur le devant de palais. Relent de ferveur pour ces pèlerins sans doute parfois
venus de loin. Sur l’aile droite du bâtiment royal, des ouvriers s’activent
jour et nuit. Construction du lieu de cérémonie funéraire, émergence d’un futur
sanctuaire. Trois mois de corps exposé avant que foule ne s’amasse pour l’ultime
envolée de Sa Majesté.
Les journées citadines se sont alignées, un peu trop
nombreuses à mon goût, nécessaires peut-être cependant pour reprendre des
forces et vers le nord filer.
Cambodge : de Veung Kham à Kompong Cham
Une frontière encore ! Dimanche ordinaire. Quelques
préposés empressés de soutirer quelques
dollars face à notre résolution de ne pas céder à cette harassante, omniprésente
corruption.. Qui aura raison de ce passage en force ? Inflexibilité de la
mère décidée à camper sur place ou vision attendrie d’un chapelet d’enfants arque boutés à leurs
montures chargées. Nul ne saura jamais mais nous voici de l’autre
côté, échappant aux premières tentatives de racket qui ne sont point sans nous rappeler quelques
souvenirs.
Le bitume réverbère ses degrés puissants. L’horizon est
plat, rizières sèches, échoppes quasi inexistantes, l’équipée se doit de
trouver toit, peu encline à planter la tente. Envie d’eau, de douche. Même les
temples se font rareté sur cette portion de route. Hésitons à rallier le
fleuve, suivre le Mékong, filer vers O’Svay, un nom qui sonne joli à l’oreille,
mais craignons de nous soumettre au risque de devoir rebrousser chemin, pris
dans les bras de pistes sans issues ; Tenons le cap droit, cap
sur Stung Treng. Peu de surprises, peu de rencontres, une route relativement face et déserte, outre la présence permanente
d’un soleil traitrement voilé, qui écrase et active la hâte d’échouer à l’écart
des UV.
Crépuscule, Claire
pivoine encaisse mal la chaleur, petit bout de fillette vaillante épuisée par les
degrés. Stung Treng : joie d’allumer un ventilo, de sentir les projections
d’un pommeau sur sa peau. Nuit de repos,
un jour de trêve aussi.
Frais gardons, micro baladons entre marché et artères sans intérêt
folichon.
La mode est au pyjama molleton. Interloqués d’abord, nous nous
demandons pourquoi chacun arbore ses petits mickey de flanelle. Hiver ?
35° tout de même ! Absence de garde-robe ? Les marchés nous montrent
la tendance, partagée entre ces apparats aux airs de parure nocturne et les
pantalons informes à motifs britishement liberty.
Bartimée, le seul non épuisé par les kilomètres peut-être, m’emboite
le pédalier pour longer le Mékong , en quête d’un reposant coucher de soleil. Le
rivage est étrange ; s’y dressent
en vis-à-vis, maisons en dur aux apparences relativement cossues et cabanes de
tôle bien sordides. Au milieu, les enfants jouent. Assis sous quelques cahutes,
on tcharre, grignote trois poissons remontés aujourd’hui ou hier (l’odeur me le
suggère !) des flots peu ragoûtants. Trainaillement de savates,
bâillements, rien ne semble affoler les soirées de bord de rive. Pimpant le
soleil s’allongeant langoureusement sur les eaux, luisants les bateaux dardant
comme d’infimes poinçons sur les eaux !
Quelques cyclos de passage nous déconseillent le tronçon
ralliant Kratie, une nationale a priori monotone. Souhaitions épouser le fil du
fleuve. Infos contradictoires. Mission serait impossible. Nous nous rangeons à
la paresse et négocions un bout de chemin, vélos en soute de bus. Apprendrons
plus tard qu’il était bel et bien possible armés de patience, de trouver un sillon à saute-moutons entre les méandres du fleuve.
Guère simple de se faire une idée à compiler trop d’avis.
Lâchés par le bus à une jonction de route, avalons petit
casse-croûte et enfourchons nos engins
non-volants.
Première occasion de tester le jus de sucre de canne qui
deviendra un petit plaisir multi-quotidien. Cannes passées à la moulinette, soupçon
de citron vert et addition de glaçon, le tour est joué.
Kampi : les dauphins de l’Irrawady n’apparaissent guère
à nos yeux scrutant pourtant les ondulations du fleuve. Mais le bonheur de
pédaloter vue sur les eaux dilapide vite
la frustration des enfants.
Sur la route, croisons des charrettes noyées sous le volume
de poteries ou de paniers. Un village peu avant Kratie nous régale de son riz
gluant cuit dans les bambous. Amusant toujours de voir dans ces pays comme les vendeurs des
mêmes spécialités s’amassent en un seul lieu. A la campagne comme à la ville, mécanos,
réparateurs de télés ou tailleurs s’agglutinent dans une même rue, bien
souvent.
Kratie nous honore d’une immense chambrée avec terrasse de
toit et vue sur le fleuve. Flanotons sur la rive, des khmers talentueux jouent
du torse et de la cheville avec leur balle-volant. Au matin, hissons nos vélos
sur une barque. Il est 8h à peine. Le soleil est doux encore comme notre
premier roulis sur l’ile. Koh-Trang. Charmés, c’est une journée entière que
nous consommerons à contempler les travaux de cette paisible vie rurale.
Perchés sur une chaise, hommes ou femmes tiennent à bout de bras sur leurs
têtes un panier de grains qu’ils déversent pour qu’enveloppent et poussières
filent au vent. Orpailleurs de végétaux, comme un flot de pépites dorées
tombant sur le sol dans une sublime lumière pailletée.
Au pied de sa maison, une femme « funambule »,
laboure d’un rouleau par buffles tracté, son lopin de terre.
L’ile sereine s’éveille sous tous ces doigts d’or qui
tissent des feuilles de palme tantôt pour parfaire leurs maisons, tantôt pour
modeler des paniers.
Enfants en uniformes sur leurs vélos à roues immenses,
cuisinières colportant leurs saveurs dans des gamelles arrimées à leurs
porte-bagages, les sourires discrets dessinent les contours d’une journée
délicieuse. Tout au sud de cette terre, flottent des maisons. Une scierie sur l’eau,
quelques autres échoppes dont nous ne pouvons à distance distinguer la
fonction, des habitats tout simplement, marquent le territoire maritime de
quelques dizaines de familles vietnamiennes.
Grande plage, bon moment de baignade, clôturons notre boucle
avant de retrouver nos pénates de pleine terre.
De Kratie à Kompong Cham, nous ne quitterons presque jamais
les longues bandes de poudreuse rouge, parsemées de petits pontons de bois et
creusant leur voie entre de belles maisons à pilotis. Une portion de régal d’une
rive à l’autre picorant avec délectation ces moments de vie quotidienne au bord
du Mékong. Rizières étincelantes de lumière magique à la tombée du jour, de ces
verts crus et luisants qui charment l’œil démesurément. Plus de rumeur de
voiture. Des temples, des mosquées bientôt, des villages où filent main dans la
main fillettes voilées et femmes à kramas, mixité de campagne qui donne de l’extérieur
tout au moins l’illusion d’un métissage harmonieux. A Chlong, pris un peu de court pour emplir nos
estomacs, testerons les œufs couvés, Bartimée dépiautant avec méthode et naturel
pas dégoûté pour un sou, pattes, tête et œil du fœtus immature !
Les maisons arborent dans la région l’estampille du temps,
une date perchée sur le faît des toitures. Les enseignes de bord de route me
font souvent sourire, plaisir d’un graphisme parfois gauche, souvent naïf.
Ne souhaitant guère nous fader des kilomètres de faubourg
pris dans la toile opaque des gaz d’échappement, nous ferons route jusqu’à
Phnom Penh dans un mini van, après un dernier petit saut insulaire sur l’ile
reliée à Kompong Cham par un pont de bambous éphémère reconstruit chaque année.
Ville, ville nous attend. Qu’en retrouverons-nous après 16
ans ?
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